Ce matin, je me suis levé avec la nostalgie chevillée au corps. Moi, qui suis si impatient, je n'aime pas trop goûter à cet état. Je m'en moque à vouloir faire la fête une semaine durant , à rire, à dénigrer tous les éléments du passé. Vaine bataille, bataille perdue dans un ciel qui transpire la langueur. Alors quand je me plonge dans ce doux inconfort, je fais deux choses, enfin, trois: la première c'est lire Pessoa, la deuxième c'est écouter Le Mans.
La troisième étant de décapsuler une canette d'Estrella Damm. Je lis les vers désabusés et tendrement ironiques du poète portugais:
Je ne suis rien.
Jamais je ne serai rien.
Je ne puis vouloir être rien.
Cela dit, je porte en moi tous les rêves du monde.
Partage entre le désespoir et l'ultime orgueil, écho maïakovskien. Je dispose tous ces poèmes sous mes yeux, je les ressens. Et j'écoute. J'écoute Le Mans, la profondeur de ces notes chaudes poudrées de sel, de chaleur et parfois ces résonances bleues, incroyables. J'ai aimé une brune éclatante qui s'appelait Xochitl, avec son accent merveilleux elle chantait ces complaintes ravissantes.
Un des albums de Le Mans s'appelait Saudade. C'est exactement le sentiment qui est lové en moi. Je ne m'en lasse pas.